Jaune : positif, joyeux, stimulant, optimisme, créativité
négatif : hypocrisie, mensonge, trahison
rire jaune : contraint, nerveux, déclenché par la peur, la honte ou la gêne
Alain se complique la vie, agit contre lui-même
J'ai nettoyé le miroir comme on efface une ardoise. Ça laisse des traces... Effacée cette blessure que j'ai infligée involontairement à un compagnon de classe ! Sa tête se trouvait au mauvais endroit au mauvais moment. Effacée, la peur du sang ? Je m'étais senti injustement accusé par l'instituteur. Effacées, la colère et la honte ? Nous jouions à lancer des cailloux pour faire choir le marron encore niché dans sa bogue. J'avais cru faire mieux en jetant une demi-brique qui traînait là.
Effacée, cette culpabilité pour un autre accident du genre ? Alors que je m'engageais dans un terrain vague cherchant l'aventure, je chassai un garçonnet en lui jetant des cailloux à distance mesurée, croyais-je, jusqu'à ce que l'un d'eux l'atteigne au genou. J'avais bien dû admettre en mon for intérieur que je n'étais pas si innocent que cela car, en réduisant l'espace entre la cible et le projectile, il s'agissait avant tout d'obtenir le résultat escompté. Qu'il me lâche une bonne fois pour toutes ! Et puis, encore la honte, quand les parents sont venus montrer la victime et se plaindre à ma mère !
Alors, oui, plus tard, il y avait eu d'autres dérapages. Ainsi, au cours de ma carrière, l'épisode relaté plus avant, avec Martine, l'infirmière et la vidéo qui avait circulé sur les réseaux sociaux. Ma mauvaise foi et ma honte !
Ma légèreté, lorsque j'ai minimisé le problème de harcèlement d'un étudiant qui s'était fait justice de cette manière. Peut-être que la direction n'a pas effacé l'ardoise...
Ce n'est pas malin. Le rendez-vous à la direction est reporté du fait que j'ai remis un certificat d'incapacité de travail d'une semaine. Pourvu que ce ne soit pas perçu comme un aveu de culpabilité ! J'ai coupé mon GSM. Noël, Sandrine et Lorelyne sont sans nouvelles de moi. Je me prive de leur soutien. J'ai laissé le centre psycho-médico-social aux mains de l'assistant social avec pour consigne d'éviter de m'appeler.
Il n'a rien trouvé de mieux que de me faire la morale. Souvent, m'a-t-il dit, nos vies s'échafaudent sur le même thème ; un peu comme si l'instituteur nous renvoyait sans cesse au même devoir, avec la mention « à refaire », jusqu'à la perfection. Nous nous entêtons dans la même démarche, dans les mêmes erreurs. Nous avons pourtant la capacité d'inventer un nouveau cheminement de notre pensée au service de l'intelligence du cœur.
Je soliloque maintenant devant mon miroir. Paradoxalement inspiré par la Ballade des pendus de François Villon, je tente une invitation au bonheur que j'adresse à mes frères humains. Bien entendu, c'est surtout moi que je veux convaincre.
Vous, frères humains, vous avez tous les pouvoirs et toutes les permissions. Rechercher le bonheur est votre droit et votre devoir.
Rien ne m'étonne de vous et tout me surprend. J'aime votre intransigeance et je la redoute car elle vous isole. J'aime votre violence et elle m'effraie.
Vouloir être unique parce que cela vous anime, vous vide, vous remplit, vous démesure, vous grandit, vous donne toute votre mesure.
Refuser le mirage du bonheur éternel ! Son immobilisme est sa mort même.
Seule la recherche de quelques instants privilégiés mobilise votre énergie et, parce qu'insaisissables dans le temps, elle décuple vos forces et votre désir de vivre.
Notre différence, malgré notre sort commun qu'est la solitude, loin d'être un frein à la communication, en est, au contraire, le véhicule.
Que de nos solitudes juxtaposées jaillisse pour un instant la certitude d'être acceptés pleinement dans nos sentiments et nos émotions authentiques.
Qu'est-ce que la vie sinon un long et terrible accouchement de soi-même ?
En finissons-nous de couper le cordon ombilical à la poursuite de la liberté et de l'indépendance.
Pourchassons sans fin les bonnes et les mauvaises fées de l'enfance ! Elles ne sont qu'illusions.
Vous avez en vous, se combattant, la force tranquille de l'amour universel et l'esprit de destruction des autres et de soi-même. Choisir la gentillesse, non comme une obligation imposée aux autres mais parce que son absence meurtrit. (678 mots)