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Couleur : noir : aspect positif : rigueur, sérieux, dignité, intégrité, puissance
Consigne : apaisement d'Alain, il se réconcilie avec lui-même et avec la vie
-Bonjour monsieur Brunin, entrez, je vous prie !
-Monsieur le Directeur ! Bonjour et désolé que vous ayez dû déplacer notre rendez-vous suite à une défaillance de ma part.
-Ne soyez pas désolé, la rareté de nos rencontres en fait une parenthèse isolée et inquiétante alors que je suis persuadé que nos échanges s'ils étaient renouvelés régulièrement n'en seraient que plus bénéfiques et productifs.
-Votre opinion m'honore. Croyez bien que je suis tout disposé à en faire la preuve si vous voulez bien m'instruire de votre requête.
-Dans ce lycée, comme partout ailleurs, notre jeunesse a fort à faire pour maintenir la tête hors de l'eau. Les problèmes d'absentéisme, de décrochage scolaire, drogue, dépression, harcèlement, identité de genre, violences physiques, psychologiques et sexuelles sont légion. Vous êtes bien placé pour le savoir, vous qui recevez nos étudiants dans le cadre des tests psychologiques. Pouvez-vous me dire si notre centre PMS possède les « outils » nécessaires pour répondre à ces problématiques ?
-Certes, notre centre fait de son mieux et nous communiquons et échangeons en fonction des spécificités conférées à chacun de nos rôles. Cependant, la charge administrative est fort lourde et notre présence sur le terrain est insuffisante. Heureusement, des liens se créent entre notre équipe et certains professeurs, surveillants scolaires et élèves. Des informations utiles remontent jusqu'à nous et Gilbert, notre assistant social, est un collaborateur efficace et consciencieux.
-Pensez-vous avoir besoin d'être davantage soutenu ?
-Un jour par semaine, nous disposons de deux stagiaires assistants sociaux de la Haute École en Hainaut, bacheliers des Sciences sociales. Gilbert est chef de stage pour l'une et je le suis pour l'autre, ce qui suppose également un certain suivi de notre part. C'est un métier en pénurie, faut-il le rappeler ?
-J'ai ouï dire, est-ce par hasard, qu'il y avait un problème de cohésion dans l'équipe...
-En effet, certains d'entre nous ont subi des avanies. Nous avons vécu une période de turbulences. Des bruits ont couru n'offrant aucun droit de réponse puisque les personnes incriminées n'en ont pas été ouvertement informées.
-C'est bien regrettable.
-À tout le moins, Monsieur le Directeur, vous en conviendrez, ce procédé est l'apanage de personnes dont les opinions ne sont pas susceptibles de changer d'un iota. Elles sont persuadées d'être dans leur droit. Et je soupçonne même qu'elles se considèrent comme des victimes. Toute justification ferait l'objet d'une interprétation défavorable. Dés lors, on ne peut qu'opposer le silence au silence afin de ne pas prendre le risque d'alimenter une campagne de dénigrement.
-Le silence est d'or et la parole, d'argent. Diriez-vous, monsieur Brunin, que l'équipe a été l'objet d'une cabale ?
-Ou bien, d'une forme d'omerta ? C'est possible. Sans doute usons-nous des mêmes armes. Personne n'est à l'abri d'une erreur, d'une confusion.
-Que l'on jette une sourde opprobre sur certains et que cela pèse et perturbe chacun, je n'en doute pas.
- Il faut rester vigilant car ces formes invisibles de harcèlement progressent dans tous les niveaux de la population. Aussi bien sur les réseaux sociaux que nos jeunes étudiants fréquentent massivement et assidûment que dans la réalité quotidienne des adultes, enseignants, parents... Enfin, le commun des mortels...
-Que proposez-vous ?
-Peut-être aurions-nous intérêt à ne pas cibler les cas particuliers mais, au contraire, à étudier une politique d'ouverture progressiste pour l'ensemble des intervenants. Une campagne d'information, le contraire d'une campagne de dénigrement, pour rendre visible et audible ce qui ne l'est pas encore.
-Comment pensez-vous réinstaller de la cohésion dans le groupe dont vous êtes le chef ?
-Rassurez-vous, Monsieur le Directeur ! Tout cela a été mis à plat. En ce qui me concerne, je n'ai eu de cesse que tout rentre dans l'ordre tant il m'importe de pouvoir continuer à me regarder dans mon miroir quand je passe la porte de mon appartement. Sans cela, je ne puis me détendre.
-Comme je vous comprends ! J'aimerais voir évoluer votre projet et je souhaite que vous me passiez un coup de fil d'ici quatre à six semaines afin que nous en discutions.
De retour au centre PMS, Alain, tout sourire, est accueilli chaleureusement par ses collègues. Il n'en revient pas. Tant de stress pour finalement passer un « test » remporté haut la main, hauts les cœurs ! Eux non plus n'en reviennent pas : quel bon vent, quel bon flair a incité le dirlo à s'intéresser de si près aux affaires du service, aux préoccupations professionnelles. On dirait un grand vent de renouveau. C'est le printemps, n'est-il pas ?